Washington et Londres ont soumis de faux documents à l'AIEA
25 mars 2003
http://www.liberation.fr/page.php?Article=98474
L'Egyptien Mohamed ElBaradeï, directeur général de l'Agence
internationale à l'énergie atomique (AIEA) rendant compte des travaux
des inspecteurs en désarmement en Irak, devant le Conseil de sécurité
de l'Onu, en janvier. Une source haut placée à l'AIEA a révélé que
les inspecteurs de l'Agence ont découvert que les documents
anglo-américains censés prouver la reprise du programme nucléaire
irakien étaient fabriqués de toutes pièces.
par Louis Charbonneau
VIENNE (Reuters) - Quelques heures et une connexion à internet ont
suffi aux inspecteurs en désarmement de l'Agence internationale de
l'énergie atomique pour réaliser que les documents anglo-américains
censés prouver la reprise du programme nucléaire irakien étaient
fabriqués de toutes pièces, apprend-on lundi de source anonyme mais
haut placée à l'AIEA.
Ainsi les documents qui tenaient ainsi pour acquis que l'Irak avait
tenté d'acheter 500 tonnes d'uranium au Niger étaient si
grossièrement falsifiés que le haut fonctionnaire français de l'AIEA
qui les a consultés en est "resté bouche bée".
"Quand les experts ont commencé à les étudier avec un oeil critique,
les choses ont commencé à se détricoter", dit-on de même source, en
estimant que les efforts minutieux déployés à cette occasion "aurait
été exercés plus utilement ailleurs".
Les Etats-Unis ont accusé l'Irak l'an dernier d'avoir ressuscité son
programme nucléaire sur la foi d'un rapport de la CIA affirmant que
Bagdad serait en mesure de fabriquer une bombe atomique dans un délai
d'un an.
George W. Bush avait estimé cette hypothèse crédible et l'avait
incorporée dans son discours sur l'état de l'Union, en janvier,
menaçant de désarmer lui-même le régime de Saddam Hussein si les
Nations unies ne prenaient pas le problème à bras-le-corps, alors que
les inspecteurs de l'Onu étaient déjà à l'oeuvre sur le terrain.
Toute tentative d'acquisition d'uranium par l'Irak, si elle avait été
prouvée, serait revenue à un aveu qu'il possédait des armes atomique
car cela aurait été pour lui l'unique intérêt d'acquérir ce métal. A
l'époque des accusations américaines, le Niger avait démenti toute
fourniture d'uranium à l'Irak.
Lorsque l'AIEA a enfin eu accès aux "preuves" brandies par les
Etats-Unis - cela a pris des mois - le physicien nucléaire français
Jacques Bautes, chef du bureau de vérification du programme nucléaire
irakien, s'est rapidement rendu compte qu'elles étaient forgées de
toutes pièces.
Deux documents étaient particulièrement suspects, dont une lettre du
président nigérien actuel qui se référait à ses pouvoirs aux termes
de la Constitution de 1965, alors que celle-ci était caduque depuis
quatre ans. En outre la signature du chef de l'Etat avait été
visiblement imitée.
Une autre lettre se référant à l'uranium, datée d'octobre 2000, était
censée émaner du ministre des Affaires étrangères Alle Elhadj
Habibou, qui n'occupe plus ces fonctions depuis...1989. Elle portait
de surcroît l'en-tête du Conseil militaire suprême dissous en 1999.
Après avoir fait confirmer par des experts que ces documents étaient
bien faux, l'AIEA a demandé aux Etats-Unis et à la Grande-Bretagne
s'ils disposaient d'autres preuves que l'Irak avait tenté de se
procurer de l'uranium. Les deux pays ont répondu par la négative.
Le directeur général de l'AIEA, l'Egyptien Mohamed ElBaradeï, a
informé début mars le Conseil de sécurité que ces documents étaient
des faux et que 218 inspections dans 141 sites potentiels sur une
période de trois mois s'étaient révélés vaines.
Le vice-président américain Dick Cheney a répété la semaine dernière
les accusations américaines sur la détermination irakienne à se doter
de l'arme nucléaire, en ajoutant que ElBaradei se trompait.
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