Transmis à la rédaction par Angelo Miranda que nous remercions pour sa vigilance
mercredi 5 février 2003
Selon un document officiel obtenu par le Los Angeles Times, un programme
vient d'être lancé par le Pentagone sur la possibilité d'utiliser des
bombes nucléaires (mini-nukes) contre des infrastructures souterraines
soupçonnées d'abriter des armes de destruction massive (biologiques,
chimiques).
Ce programme est composé d'ordinateurs et de calculateurs ultra-rapides
qui prendront en compte de multiples données (types de structures,
lieux…) pour savoir quelle arme
(nucléaire ou conventionnelle) serait mieux à même de détruire la cible
visée.
Outre des informations techniques sur la cible à détruire, ce programme
va évaluer également les conséquences et les dommages collatéraux
provoqués par l'utilisation d'une arme nucléaire, comme le rejet de
poussières radioactives, de matières chimiques ou biologiques qui
n'auraient pas été détruites.
Ce programme d'un milliard et 260 millions de dollars est la dernière
étape d'une vaste campagne soutenue par des fonctionnaires de
l'administration Bush pour promouvoir l'utilisation des armes nucléaires
tactiques. En effet, pour ces faucons, les missiles stratégiques (ICBM)
sont des armes de destruction "trop" massive face à de nouveaux
adversaires comme le régime de Saddam Hussein ou inutiles face à des
réseaux terroristes comme celui d'Al Quaida...
Vers un changement de doctrine nucléaire ?
La mise en place de ce programme signifie bien que les Etats-Unis sont
en train de repenser totalement leur doctrine de l'arme nucléaire.
Ainsi, depuis près de cinquante ans, la règle "non-dite" établit que
l'emploi de l'arme nucléaire ne peut être fait qu'en cas d'ultime
recours ou en cas de réponse à une attaque nucléaire.
Aujourd'hui différents éléments montrent que les Etats-Unis sont en
train de faire passer l'arme nucléaire tactique du statut de dernier
recours à celui d'une utilisation active au nom de la lutte contre le
terrorisme :
la Nuclear Posture Rewiew énoncée en 2002 appelle à revitaliser le
complexe de fabrication des armes nucléaires pour mettre au point,
développer, fabriquer et certifier
de nouvelles têtes nucléaires. L'arsenal nucléaire aura, ainsi, la
capacité de viser et de détruire des cibles mobiles ainsi que des
bunkers profondément enterrés ;
le lancement d'une étude en juin 2002 sur de nouvelles ogives
nucléaires anti-bunker plus performantes, désormais appelées Robust
Nuclear Earth Penetrator, RNEP ;
en décembre 2002, lors de son discours sur la stratégie nationale
pour combattre les armes de destruction massive, le Président Bush
déclarait "les agences civiles et
militaires des Etats-Unis doivent posséder la gamme complète des
possibilités opérationnelles pour parer la menace et l'utilisation
d'armes de destruction massive";
des plans intitulés "Theater Nuclear Planning", pour un recours à
l'arme nucléaire seraient actuellement étudiés par des experts du
commandement stratégique
américain au quartier général du STRATCOM à Omaha (Nebraska) ;
enfin au cours du mois de janvier 2003, le président Bush a
clairement indiqué qu'il n'écartait aucun moyen militaire pour répondre
à toute attaque chimique ou
biologique de la part de Saddam Hussein.
Outre cette attitude pro-nucléaire des faucons de Bush, on peut craindre
la déstabilisation complète et totale de l'ensemble des politiques des
autres puissances nucléaires. En effet, les quatre autres puissances
nucléaires reconnues par le TNP (Chine, France, Royaume-Uni, Russie)
vont logiquement abaisser le seuil de leur défense nucléaire,
c'est-à-dire, qu'ils seront susceptibles de mettre au point et
d'utiliser également des mini-nukes pour rester dans cette nouvelle
course aux armements nucléaires. Imagine-t-on la Russie utiliser ce type
d'arme pour éradiquer les opposants Tchétchènes également au nom de la
lutte contre le terrorisme ? Quant aux trois autres puissances
nucléaires non reconnues (Inde, Israël, Pakistan), quelle sera leur
attitude face aux multiples situations conflictuelles qu'elles
connaissent ?
Observatoire des armes nucléaires françaises
CDRPC, 187 montée de Choulans, F-69005 LYON
Contact : Jean-Marie Collin, 04-78-36-93-03
jean-marie.collin@obsarm.org
NB : Documents disponible sur notre site internet :
www.obsarm.org
Les "Mini-Nukes, par Bruno Barrillot,
"Les restrictions nucléaires américaines, une pure comédie : Les
plans secrets de l'administration Bush pour renforcer ses forces
nucléaires" par Jean-Marie Collin
Créé en 1984, le Centre de Documentation et de Recherche pour la Paix et
les Conflits (CDRPC) est un centre d'observation et d'expertise français
indépendant qui effectue des recherches et diffuse de l'information sur
les questions de défense et de sécurité. Le CDRPC a pour objectif
d'encourager une politique de transparence sur le commerce des armes,
dans la perspective d'une démilitarisation progressive. Les activités du
Centre s'articulent autour de deux observatoires :
L'Observatoire des transferts d'armements, les objectifs de
recherche sont axés sur les thèmes de l'industrie d'armement des
transferts d'armements, et de la
politique de défense menée en France.
L'Observatoire des armes nucléaires françaises, fait des analyses
complète sur l'arsenal des puissances nucléaires, dans la perspective de
l'élimination des armes
nucléaires conformément aux vœux du Traité de non-prolifération
nucléaire.