Lettre ouverte 10/12/02
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Voici une lettre ouverte que nous a fait parvenir Gabriel Enkiri: La rédaction de "la-paix.org" a  décidé de la publier non parce que nous faisons la promotion d'un parti politique (nous considérons que les projets de paix n'appartiennent à aucun parti mais à tous ceux qui la souhaitent et dont les actions vont dans le sens de la paix) il nous semble que les idées de cette lettre vont dans ce sens.

Vous avez des idées pour la paix vous pouvez nous les envoyer ici


A l’attention de Jacques Chirac

   Président de la République                                                

                                                                   POURQUOI J’ADHÈRE A L’UMP

                                                                                    par Gabriel Enkiri*

 Le conflit est planétaire. La compétition entre les grandes puissances, qui a commencé il y a tout juste un siècle, connaît un nouveau développement spectaculaire : pour la première fois dans l’Histoire, un gouvernement (celui de Washington) annonce urbi et orbi « qu’il veut la guerre, qu’il la prépare, et qu’il va la faire »… Toute l’Humanité est confrontée aujourd’hui à ce défi (le « défi américain » dont parlait si justement JJSS, il y a trente cinq ans déjà !). Nous voici tous au pied du mur.

Le conflit israélo-arabe (ou israélo-palestinien), en se poursuivant, permet à l’actuel gouvernement américain (bien différent de celui qui l’a précédé !) d’envisager une mainmise, par une action militaire d’envergure, sur tout le Proche et le Moyen Orient. Cette région est la plus stratégique du monde parce qu’elle est à la fois le « ventre mou » de la Russie, de la Chine, de l’Inde… et de l’Europe… et le réservoir énergétique du monde industriel ! Pour l’unique super-puissance (américaine), il est indispensable de s’y incruster fortement et durablement. C’est pourquoi je pense, que même sans les attentats du 11 septembre, un gouvernement américain y serait venu tôt ou tard. La légende de l’Amérique « pacifique et non-interventionniste » a vécu. Notons au passage que, sous le premier Roosevelt (Théodore), à la fin du 19e siècle, elle fut déjà interventionniste (« politique de la canonnière »).

            Nous en avons la preuve avec l’épisode irakien. Pendant un an, les Américains nous ont assuré qu’ils faisaient la chasse au « Ben Laden » ! Parmi les kamikazes de Manhattan, il n’y avait pas un seul irakien (de même, précisons-le, il n’y avait ni Afghan, ni taliban). Et voici que sous l’affiche « Ben Laden wanted » qui se décolle, nous découvrons une autre affiche « pétrole irakien wanted » avec au-dessus le portrait de Saddam Hussein ! Faut-il vous faire un dessin ?

            Ariel Sharon, qui est, lui, dans une impasse, ne sait plus comment en sortir. Une bonne intervention américaine l’aiderait à imposer « sa solution à lui ». Connaissant le personnage, et son passé, on la devine. L’Angleterre, qui rêve d’un retour « impérial » dans une région qui lui appartint naguère, colle au plus près de l’Oncle Sam. Et Poutine, aux prises avec les Tchétchènes, sollicite, lui aussi, l’aide des Américains, sans parler de la mafia inféodée probablement… à la mafia américaine ! Nous avons donc quatre gouvernements qui sont « demandeurs d’une action violente ». C’est pourquoi je suis convaincu que la guerre est véritablement programmée

            Pouvons-nous encore l’empêcher ? Pouvions-nous empêcher celle de 14 ? Celle de 39 ? Sans doute. Avec le recul, nous voyons bien que de graves fautes furent commises par nos gouvernants, aveuglés par des préjugés idéologiques. Aujourd’hui, les idéologies sont mortes, et les brouillards se sont dissipés. Nous voyons fort bien ce qu’il faut faire pour sauver la paix.

            Premièrement, il faut, plus que jamais, donner ou redonner vie au couple franco-allemand. Deuxièmement, il faut faire un demi-tour sud, c’est-à-dire cesser de regarder Bruxelles dans le fond des yeux (des fonctionnaires) et se tourner vers le sud, vers la Méditerranée, en proposant aux protagonistes du conflit israélo-arabe une grande conférence pour la paix qui aurait pour objectif : deux États sur le territoire de l’ancien mandat britannique, un État palestinien au côté de l’État juif. Pratiquement tout le monde est désormais convaincu que c’est le seul moyen de restaurer la paix dans cette région. Troisièmement, nous proposons à tous les États de la Méditerranée de construire dans la foulée (de la paix) un Marché Commun Méditerranéen. Ce qui règle le problème de la Turquie (qui ne serait pas, selon Giscard et quelques autres, européenne) : n’est-elle pas, à coup sûr, méditerranéenne, tout comme les pays du Maghreb ?

            Et last but not least, quatrièmement, Jacques Chirac doit se rendre à l’ONU (accompagné, pourquoi pas ?, de Gerhard Schröder) pour y proposer non seulement une grande conférence pour la paix sous l’égide de l’Assemblée internationale, mais aussi une refonte de l’Assemblée afin de la rendre plus représentative et plus démocratique et l’adapter à notre époque caractérisée par la mondialisation de nos problèmes. Et pour couronner le tout, il devrait en proposer le transfert (pourquoi laisser l’ONU aux Américains qui en ont fait leur « danseuse » ?) précisément au centre du monde, là où se rencontrent le Nord et le Sud, l’Est et l’Ouest, je veux dire au Liban, ce qui permettrait à l’Assemblée internationale de superviser sur place l’application du Traité de Paix entre Israéliens et Palestiniens, en y installant, s’il le faut, et le temps qu’il faudra, des casques bleus le long de la frontière entre les deux États, tous deux reconnus et admis à l’ONU.

            Enfin, pour nous Français et francophones, il est évident qu’il va falloir renforcer les liens, tant sur le plan économique que culturel, et diplomatique, entre les États qui sont francophones, ou adhérents à la francophonie, afin de donner une dimension planétaire à notre expression linguistique, tout en préservant l’identité de chacun.

            Voilà pourquoi je donne mon adhésion à l’UMP – là où il faut être en ce moment si l’on veut être efficace (la gauche étant devenue erratique) – et j’appelle tous ceux qui sympathisent avec les options exprimées dans ces colonnes, en priorité les partisans de la paix nécessairement basée, répétons-le, sur la création d’un État palestinien au côté de l’État juif, à en faire autant pour que très vite nous puissions nous faire entendre au sein d’un courant regroupant tous ceux et toutes celles  qui rejettent l’option belliciste.

            Foin des rivalités de personnes ! Ne perdons pas de temps. Imposons la paix maintenant. Dans trois mois, il sera sans doute trop tard.

 

* auteur de « Israël le dernier quart d’heure » 2e édition, actualisée et complétée (Éditions Phare/Ouest – distribution Alterdis pour la France, et Al Bouraq pour le Liban et le monde arabe). 

   75, Bd Brune – 75014 Paris

* j’adresse ce message en « tribune libre » au Monde et à Libération…